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12 mars 2018 1 12 /03 /mars /2018 21:50
Le garçon sauvage : carnet de montagne de Paolo Cognetti

La lecture de ce bref récit a été pour moi un ravissement : Paolo Cognetti a , avec tout son talent d'écrivain , transposé ce que j'ai ressenti lors de mes séjours dans les Pyrénées il y a quelques années ; les montagnes sont les mêmes  et j'ai reconnu ces ruines de bergeries que l'on découvre dans d'anciens alpages envahis de fougères , avec une envie similaire d'en savoir plus sur la vie des bergers d'autrefois ...

La solitude dans ces paysages immenses que l'on recherche lorsque la vie quotidienne citadine devient trop pesante , ne guérit pas de ses propres maux, on pense, au début y trouver l'apaisement mais  , est-ce la perspective des silhouettes découpées des sommets , la difficulté d' y progresser, l'ombre envahissante des montagnes après la clarté des prairies , le froid et le vent lancinants ,la paix tant espérée n'arrive pas et l'on redescend le pas lourd et l'esprit nostalgique en fermant pour l'hiver la porte de la bergerie vers la morne plaine .

Avec également de nombreux extraits de Thoreau et les magnifiques poèmes d'Antonia Pozzi

Ce carnet de montagne est annonciateur du très beau roman : Huit montagnes que j'avais lu précédemment, je vous recommande ces deux lectures, de préférence dans leur ordre chronologique même si vous n'êtes pas un adepte des cimes, le sommet est aussi dans les mots  de l'auteur .

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10 mars 2018 6 10 /03 /mars /2018 12:07
Juste après la vague de Sandrine Colette

Depuis ma rencontre avec Sandrine Colette, j'attendais avec fébrilité son nouveau roman .

Voilà chose faite :  j'ai aimé sans ressentir le coup de coeur que j'avais eu pour ces deux romans précédents : Il ne reste que la poussière et Les larmes noires sur la terre .

Parlons un peu de l'histoire: une famille , après un raz de marée , les parents et leurs neuf enfants, se retrouvent isolés , cernés par les flots sombres , dans leur propriété et ils ne savent pas ce qu'est devenu le reste du pays ... Ils ont des poules, un jardin, un garde-manger bien rempli et une  cohésion familiale à toute épreuve , la vie s'organise donc sans vraiment de stress , attendant la décrue que chacun guette en secret mais à l'inverse de ce qu'on pouvait penser, l'eau continue de monter et il va bien falloir trouver un refuge plus élevé . Le dilemme va être cruel car la seule embarcation disponible est trop petite pour l'ensemble de la famille et un choix s'impose , qui va rester dans la maison au péril d'être noyé ...

Même si c'est bien écrit, bien construit , avec beaucoup de trouvailles et une tension croissante au fur et à mesure de la montée inexorable de l'eau ... j'ai trouvé quelques longueurs , des éléments qui n'apportent rien au récit et j'ai peu été émue en dehors des chapitres relatant la survie des trois enfants abandonnés, en particulier le petit Noé, un prénom prédestiné ?

De plus, je dois avouer une phobie de ces gigantesques débordements aqueux,  avec dans la tête ces effroyables images de tsunamis ; comme l'écrivain, j'ai la hantise de cette eau qui monte et qui recouvre tout sur son passage , or, si Sandrine Colette peut exorciser sa peur en écrivant , moi, en lisant je n'ai pu que me plonger dedans en essayant de garder la tête au sec !

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4 mars 2018 7 04 /03 /mars /2018 18:18
Une femme que j'aimais d'Armel Job

Claude Janssens fait partie de cette catégorie d'individus sans talent, sans passion , sans histoire , un homme solitaire qui lorsque sa journée de travail comme aide-pharmacien rejoint son petit appartement au dessus de l'officine et qui le week-end rentre chez ses parents .

Le samedi est une journée particulière car il rend visite à sa tante Adrienne, la veuve du frère de son père , une femme plus âgée que lui mais qui possède , à ses yeux , tous les charmes dont un homme peut rêver ...Adrienne a un secret qu'elle désire confier à son neveu or celui-ci ne se sent pas prêt à recueillir les confidences de cette belle femme .

Bien sûr, cette amitié "particulière" n'est pas bien vue par la mère de Claude qui n'a jamais aimé sa belle-soeur .

C'est au cours d'une de ses visites hebdomadaires que Claude découvre Adrienne morte dans sa cuisine au milieu de la vaisselle brisée et du sucrier renversé et son premier réflexe est de retourner prévenir ses parents  .

La mort brutale de celle qui était son rayon de soleil entraine Claude dans une enquête pour découvrir ce secret qu'elle n'a pas pu lui dire .

Je n'ai pas pu rentrer véritablement dans cette histoire, la personnalité de Claude reste celle d' un être banal, même si la mort de sa tante a un effet coup de fouet dans sa vie puisqu'il va enfin rencontrer et surtout s’intéresser à d'autres personnes , et la découverte du fameux secret ne m'a pas fait spécialement vibrer !

Dommage , j'aime bien habituellement l'ambiance des romans d'Armel Job !

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26 février 2018 1 26 /02 /février /2018 12:39
Anna la douce de Dezsö Kosztolanyi

L'écueil avec ce roman de l' écrivain hongrois du début du XX ème siècle, Deszö Kostolanyi  est de le comparer à celui de Magda Sazbo : La Porte , dont le sujet peut paraitre identique puisque chacun traite de relations entre des femmes et leurs bonnes , à Budapest au XXeme siècle .

Mais il faut dépasser cette similitude car les deux histoires sont très différentes dans le fond et la forme .

Dans Anna la douce, c'est la description d'un milieu aisé en 1919 à un moment crucial de l'histoire de Budapest : le départ des communistes avec tout le soulagement que ces gens ont pu ressentir : la fin d'une période où beaucoup de ces hommes avaient perdu leurs fonctions dans les différents ministères , où les appartements avaient du être partagés etc ...c'est le cas du couple Vizy mais le changement politique dans ce milieu n'est qu'un retour à un état antérieur, les hommes retrouvent leurs emplois, les femmes leurs réunions et papotages dont le sujet préféré est celui des bonnes et les autres individus, comme le concierge de l'immeuble des Vizy , leur façon obséquieuse pour ne pas déplaire aux propriétaires . C'est ainsi que Figzor,  fait embaucher  Anna, une cousine de la campagne , en vantant ses qualités à une Madame Vizy éternelle insatisfaite de ses employées .

Nous en saurons peu quant aux pensées d'Anna, elles ne sont que suggérées mais cela suffit à imaginer son ressentiment : traitée comme un objet que l'on possède, que l'on fait parfois admirer pour susciter la jalousie des autres et dont on décide du sort en fonction de ses propres besoins.

Il n'y a pas de tentative d'explication de l'attitude d'Anna de la part de l'écrivain , quoique ces courts chapitres aux phrases simples qui se contentent en principe de décrire les faits sont en eux-même édifiants . Chaque membre des différentes communautés : patrons ou employés se rallient à leurs intérêts et non à leur conviction et le lecteur est laissé à son propre jugement ; seul le  dernier chapitre peut apporter un éclairage singulier  sur cette peinture acerbe de la société hongroise dans son ensemble .

J'ai préféré le roman de Magda Sazbo qui va beaucoup plus loin dans l'analyse des sentiments , ceci étant facilité par son aspect autobiographique et le face à face de deux personnalités mais qui est, de ce fait,  plus distant vis à vis " de la lutte de classe "et de la critique de la société .

 

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17 février 2018 6 17 /02 /février /2018 21:29
Les loyautés de Delphine de Vigan

Quand on aime le tout début d'un livre, son avis est forcément influencé ...

J'ai trouvé magnifique la définition que Delphine de Vigan fait , comme introduction à son nouveau roman , de la loyauté , c'est un terme que l'on n'emploie plus vraiment alors que son sens est fort et devrait guider nos vies tout comme l'empathie dont on nous ressasse les oreilles , même si c'est à juste titre mais il ne suffit pas de le prononcer à tout bout de champ comme un bouclier : On ne voit bien qu'avec le coeur . L'essentiel est invisible pour les yeux disait Antoine de Saint-Exupery ...

J'avoue avoir été touchée par l'histoire de Théo, un pauvre gosse , balloté entre ses deux parents qui n'ont pas su se séparer sans tout faire exploser : le jeune garçon se sent , comme souvent, responsable de ses parents et tente de les protéger d'abord d'eux même .

Le récit alterne avec la voix de Théo, celle de Mathis  son meilleur copain qui ne veut pas le trahir, Hélène, la prof qui reconnait la souffrance de l'enfant parce qu'elle a vécu aussi une enfance douloureuse et Cécile, la mère de Mathis dont la vie bascule également .

On voudrait nous aussi pousser la porte, pousser les murs , crier - Ah quelle intensité dans l'émotion!

 

 

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17 février 2018 6 17 /02 /février /2018 20:54
Le procès des étoiles de Florence Trystram

Le sous titre de ce livre est : Récit de la prestigieuse expédition de trois savants français en Amérique du Sud et des aventures qui s'ensuivirent (1735-1771 ) .

De ces trois savants , seul Charles Marie de la Condamine, le géographe était connu, du moins par moi,  les deux autres : Louis Godin  , mathématicien et Pierre Bouguer, mathématicien et astronome sont passés dans la grande moulinette de l'oubli , ainsi qu'un certain nombre d'autres membres : ingénieur, horloger, aide-géographe , médecin et chirurgien . .. alors que cette expédition commanditée par l'Académie royale des Sciences de Paris pour mesurer un arc méridien terrestre afin de déterminer la forme exacte de la terre est tout simplement incroyable et cette histoire se lit comme un bon roman d'aventures .

Partis pour quelques mois en même temps qu'une autre expédition au Pôle Nord dans un but identique , c'était sans compter la longueur du voyage en passant par la Colombie et le Pérou , la fragilité des appareils scientifiques , le laisser aller de Godin devant une vie coloniale pleine de tentations ...

Arrivés à Quito en ordre dispersé , les travaux peuvent enfin commencer , les difficultés surgissent rapidement , le terrain et l'altitude ne sont pas propices, les équipes embauchées sur place ne sont pas fiables, les appareils se dérèglent , la météo est abominable , les maladies éprouvent le corps et l'esprit.

Malgré tous les obstacles les savants s'acharnent , recommencent encore et encore avec une incroyable tenacité , et quand une étape est franchie, la suivante n'est pas plus simple : cela prend des mois puis des années .

L'argent vient à manquer , les esprits s'échauffent et les équipes se séparent, les accidents surviennent avec ses inévitables morts .

Mais quelle obstination chez ces hommes, ils avancent sans en voir le bout et restent cependant curieux de tout , prêts à faire un détour qui peut durer des mois pour satisfaire leur curiosité, leur soif insatiable de connaissances .

Une magnifique leçon de courage, d'esprit d'aventure et de volonté de faire avancer la Science alors qu'à notre époque tout semble si simple et rapide !

 

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10 février 2018 6 10 /02 /février /2018 17:29
Le nuage d'obsidienne d'Eric McCormak

A partir de la découverte d'un vieux livre dans une obscure boutique à la Verdad , relatant un phénomène météorologique particulièrement intrigant, le héros, Harry Steel, remonte le cours de sa vie . En effet, par un hasard incroyable, cet événement a eu lieu dans une petite ville d’Écosse où il a passé , jeune homme, quelques mois et où, surtout il a connu une grande peine de cœur , profonde blessure qui l'a poursuivi toute sa vie .

Par petits chapitres, on découvre les faits marquants de son existence , ses rencontres, et l'histoire des personnes qu'il a croisées à travers les continents et qui sont toujours des récits peu ordinaires .

Ce nuage d'obsidienne où les gens voient leur reflet n'est au fond que le miroir de notre propre existence , une représentation déformée de la réalité ou la face obscure de nos rêves.

Finalement, c'est une réflexion plus profonde que la narration de quelques fragments de vie atypiques et la recherche de quelque chose qui est différent d'un individu à l'autre !

J'ai bien aimé.

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19 janvier 2018 5 19 /01 /janvier /2018 16:21
La salle de bal d'Anna Hope

N'ayant pas participé à l'enthousiasme autour du premier roman d'Anna Hope, je n'ai pas mis un grand empressement à découvrir La salle de bal .

J'ai été , à mon grand étonnement totalement séduite par cette histoire .

1911, en Angleterre, comme dans le reste de l'Europe, ce sont les balbutiements de la psychiatrie, on entasse les malades dans des asiles d'aliénés , et Freud , même s'il a commencé à publier , n'est pas encore reconnu par ses pairs . Dans l'asile de Sharston, le Docteur Füller, le premier adjoint au médecin chef est un fervent adepte de l'eugénisme et milite pour la ségrégation contre la stérilisation ...

On sait bien qu'à cette époque, les critères d'enfermement étaient plutôt larges, il suffisait parfois de sortir du rang dans lequel on vous met, d'avoir envie de façon un peu impulsive d'une bouffée d'oxygène dans une existence toute tracée ou parfois de rester prostré après un drame ...

C'est ainsi que se retrouvent enfermés dans cet asile Ella et John .

L'évolution de la pensée des personnages, du ressenti en fonction d'événements qui interférent  dans leur vie, en particulier, le changement radical de comportement du Docteur Füller bien peu scientifique rendent le roman passionnant et j'ai tremblé d'inquiétude quant au devenir d'Ella et de John !

Il est également intéressant de regarder les photos d'archive et de découvrir la fameuse salle de bal : cela rend le roman encore plus poignant à mon avis .

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16 janvier 2018 2 16 /01 /janvier /2018 10:49
A la table des hommes de Sylvie Germain

Un conte philosophique comme une belle parenthèse entre deux romans noirs .

Mais de la noirceur, on en trouve également beaucoup dans cet ouvrage .

Noire, la guerre qui ravage la campagne où nait Babel, 

Noirs , les charniers laissés par les soldats, 

Noire , la trace de sang rouge lorsque les chasseurs traquent le gibier,

Noires, la haine et la bêtise des gamins du village où est recueilli l'enfant sauvage,

Noire , l'intolérance aveugle qui caractérise notre époque .

Seulement , comme une note d'espoir , il y a aussi de la lumière :

celle de la jeune mère qui a perdu son enfant et donne son lait au petit être arraché à sa famille 

celle des animaux qui de leur chaleur et de leur présence réconfortent le petit ,

celle des belles personnes qui vont croiser le chemin de Babel et l'emmener plus haut et plus loin dans la connaissance jusqu'à ce que Abel a appris lui suffise pour supporter le poids du reste de sa vie.

Et puis la corneille Doudi, mémoire vivante du monde dont il est issu et qui le suit comme une ombre bienfaisante .

 

 

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14 janvier 2018 7 14 /01 /janvier /2018 12:21
Knulp de Hermann Hesse

Je crois bien que je n'avais jamais lu d'écrits d'Hermann Hesse ...

Knulp , court roman en trois parties est sans doute une excellente façon de faire connaissance avec l'auteur .

A travers les choix ou , pour si on considère le point de vue de ses amis, les renoncements  et à travers les rencontres à différents âges de la vie qu'a fait Knulp , le vagabond , puis,    le face à face avec le créateur au moment où la mort s'annonce , la question essentielle posée dans ce récit est : que fait-on de sa vie ?

Choisit-on vraiment ou est-ce déjà déterminé par son destin ? la question se pose à chacun et le récit a beau être bref, il entraine rapidement une réflexion .

Homme complexe, érudit , qui a préféré une vie libre à une aisance matérielle  qu'il trouvait monotone, Knulp est un jouisseur de la beauté et de l'éphémère mais c'est finalement un homme seul.

Très beau texte .

 

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