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28 septembre 2016 3 28 /09 /septembre /2016 11:05
Les maraudeurs de Tom Cooper

La vie n'a jamais été simple à Jeanette petite bourgade de Louisiane.

L'activité principale est la pêche à la crevette dans les bras du bayou, travail pénible et peu rémunérateur, mais les fils de pécheurs deviennent pécheurs à leur tour et reprennent le bateau familial.

Ca , c'était avant Katrina , cet ouragan qui a dévasté la Louisiane et a laissé des séquelles profondément ancrées : perte d'êtres chers comme la mère de Wes Trench et pertes matérielles et aussi , pour en remettre une couche nauséabonde, c'est le cas de le dire, c'était aussi avant la marée noire dont la grosse compagnie qui exploite le pétrole veut minimiser les effets et décide d'indemniser les victimes avant un éventuel procès mais qui a détruit l'écosystème en particulier les crevettes et rend les gens malades .

Tom Cooper a choisi de nous faire suivre dans de courts chapitres une galerie de personnages atypiques qui tentent de survivre accrochés à leurs racines dans ce coin vraiment désolé .

Le plus jeune, c'est Wes Trench, 18 ans qui vit seul avec son père depuis la disparition tragique de sa mère, il le seconde sur le bateau de pêche mais le bonhomme n'est pas tendre et Wes ne le supporte plus.

Il trouve asile sur le bateau de Lidquist, un pêcheur lui aussi , un homme manchot dont on a volé la prothèse et qui a la lubie de chercher le trésor d'un flibustier avec un détecteur de métaux dans tous les marécages du bayou, ce qui lui vaut bien des déboires .

C'est comme ça que Lidquist va se frotter aux jumeaux Troup, jeunes hommes violents aux activités illégales et qui n'aiment pas qu'on vienne farfouiller sur leur île .

Sans oublier Crosgrove et Hanson, escrocs à la petite semaine et qui vont se confronter à plus tordus qu'eux .

On ne s'ennuie pas, ce petit bout de Louisiane est attachant de véracité , de pugnacité devant les calamités qui s'accumulent et il faut vraiment être né là-bas pour supporter la chaleur suffocante, les marécages avec leurs charmants alligators, serpents et araignées .

Tom Cooper sait y faire pour nous faire vibrer , son histoire a une charpente solide : étonnant de maitrise pour un premier roman !

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27 septembre 2016 2 27 /09 /septembre /2016 15:49
Les Oiseaux de Christophe Colomb d'Adrien Goetz

Magnifique couverture pour un très court roman .

Et encore, la partie "romanesque" est une portion congrue devant la description très bien documentée du Musée du Quai Branly, de ses origines, des difficultés de son implantation dans le quartier, des personnes qui le dirigent et de l'organisation des expositions .

Alina, jeune fille de 13 ans passe quelques mois chez son oncle et sa tante à Paris pour parfaire son français, elle vient de la province des Asturies en Espagne .

La famille habite tout près du musée et Alina y fait la découverte des Taïnos, première peuplade rencontrée par Cristobal Colomb lors de ses voyages, curieuse et émerveillée par la variété des peuplades , elle va découvrir bien d'autres choses ...

Belle leçon de vie et moi, cela m'a donné envie d'aller visiter ce musée !

Un dernier petit mot puisqu'il est question finalement d'oiseaux  dans le roman , pour vous dire que je vois aussi des sittelles dans mon jardin du Sud-Ouest, la sittelle Torchepot qui n'est pas celle du roman ni l'oiseau en couverture du livre .

 

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24 septembre 2016 6 24 /09 /septembre /2016 14:52
Chanson douce de Leïla Slimani

Pas de suspens dans ce roman car l'histoire débute par la vision cauchemardesque des corps des deux enfants de Myriam et Paul et que l'on sait d'emblée que l'auteur du meurtre est la nounou Louise .

Non, ce qui constitue la charpente du livre, c'est le cheminement lent et implacable qui aboutit au drame , et là Leïla Slimani est vraiment orfèvre dans l'art de distiller lentement le poison dans la relation entre les protagonistes .

Myriam, après la naissance de ses deux enfants, Mila et Adam, désire reprendre son métier d'avocate, le rôle de mère au foyer ayant trouvé ses limites ; en accord avec son mari Paul qui se consacre lui à la production musicale , ils trouvent la perle des nounous : Louise , une femme d'une quarantaine d'années qui vit seule .

Très rapidement Louise devient indispensable à la bonne organisation de la famille, non seulement elle s'occupe bien des deux enfants qui l'adorent mais elle range l'appartement, fait les courses et prépare les dîners , elle part en vacances avec eux : qui n'a pas rêver d'une telle fée du logis ? Myriam se consacre pleinement à son travail sans vraiment culpabiliser , le temps véritable donné à sa progéniture est toujours difficile à trouver , mais ce n'est pas grave : il y a Louise et Paul lui aussi y trouve son compte , il est moins présent chez lui et le business marche bien , le couple acquiert un confort financier appréciable et une position sociale enviable ...

Mais Louise s'enferme dans la solitude et la mélancolie jusqu'au délire sans que personne ne soupçonne le malaise .

Leïla Slimane ne juge pas, elle présente adroitement les faits, met en exergue notre société avec ses failles , en particulier le fossé social qui se creuse vite , la grande solitude de certains .

Elle ne cherche pas à rendre ses personnages sympathiques , c'est un constat d'échec porté à son paroxysme avec la mort des enfants et qui fait réfléchir chacun sur la place qu'il veut occuper dans la société, l'importance qu'il accorde à l'éducation de ses enfants et à l'amour qu'il leur porte et qui n'est pas seulement une histoire de confort ou de délégation d'affection .

C'est un livre qui marque et qui pour beaucoup de lecteurs restera ancré dans leur mémoire comme un petit signal d'alerte ...

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22 septembre 2016 4 22 /09 /septembre /2016 14:10
L'enfant qui mesurait le monde de Metin Arditi

Voilà un nouveau roman qui me réconcilie avec Metin Arditi !

Après mon avis assez mesuré sur La confrérie des moines volants, j'avais boudé Juliette dans son bain ...

Ici, retour en Grèce, à Kalamaki, petite île proche d'Athènes à notre époque , la crise est passée par là et n'a pas épargné les habitants de l'île .

Eliot Peters , architecte américain s'y est installé depuis une douzaine d'années au moment de la mort accidentelle de sa fille venue en Grèce étudier les théâtres antiques et le mystère de leur construction et retrouver également ses racines familiales .

Maraki, sa voisine, pêche la nuit à la palangre et pendant ce temps , Eliot veille sur son fils, Yannis , un jeune garçon autiste .

Pour Yannis, rien ne doit perturber l'ordre et l'harmonie du monde, à commencer par le sien : l'ordre de l'arrivée des bateaux de pêche, le poids des poissons ou le nombre des clients du bar : tout est comptabilisé et fait l'objet de savants tableaux qu'il garde dans sa tête .

Eliot lui raconte en les illustrant les légendes grecques avec leurs personnages mythologiques tout en poursuivant les travaux de sa fille .

Cet équilibre si précaire de l'île va être totalement perturbé par un grandiose projet immobilier dans le plus beau coin de Karamaki.

Cela attise la convoitise de chacun, les ambitions personnelles, l'appât du gain et les magouilles bien sûr sous le regard horrifié de certains amoureux de la beauté sauvage de la baie dont fait partie Eliot.

Metin Arditi nous offre une vision réaliste de la crise grecque, son retentissement sur la vie de gens humbles en même temps qu'un portrait émouvant d'un garçon pas comme les autres , entouré par la communauté de son village soudée jusqu'à l'annonce de gains, et comme souvent on ne peut que constater que l'appât de l'argent dévoile les cotés sombres de l'âme humaine .

Reste à savoir comment tout cela va finir car ne comptez pas sur moi pour vous dévoiler la fin ...

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16 septembre 2016 5 16 /09 /septembre /2016 10:30
Voici venir les rêveurs de Imbolo Mbue

Il faut sans doute être soi-même d'origine camerounaise et avoir vécu la plongée soudaine dans le monde américain pour décrire aussi bien ce que vivent et ressentent Jende Jonca et sa femme Neni lorsqu'ils s'établissent à New-York en rêvant d'offrir à leurs enfants une vie meilleure .

Jende est arrivé trois ans auparavant et grâce aux connaissances de son cousin , il obtient le poste tant prisé de chauffeur particulier d'un banquier , Clark Edward , cela lui permet de faire venir femme et enfant de Limbe , village camerounais où il n'était qu'un petit employé municipal et ne pouvait prétendre épouser Neni.

Ne reste pour cet homme courageux, travailleur et honnête qu'à obtenir la fameuse Green Card, véritable et unique Graal pour ne pas se faire expulser ... L'avocat en charge de son dossier est confiant.

Neni, elle, rêve de devenir pharmacienne et s'inscrit à la faculté .

C'est sans compter que nous sommes en 2008 et que l'employeur de Jende travaille chez Lehman Brother qui fait faillite, on s'en souvient bien . Cet événement va totalement bouleverser la situation y compris celle de la famille Jonca.

Cette histoire est particulièrement marquante car l'écrivain fait vivre le lecteur de l'autre coté de la barrière, celle de ces immigrés qui ont idéalisé l'Amérique ; elle sait rendre attachante cette communauté camerounaise, joyeuse malgré les difficultés, ces hommes et ces femmes réalistes chacun à leur façon, Jende plus malléable et fataliste que Neni obstinée à réussir sa vie aux Etats Unis et qui va se trouver au coeur du drame familial des Edward, car la vie des américains n'est pas , non plus, l'eldorado qu'ils avaient imaginé .

La fin surprend mais elle est pleine de sagesse et d'espoir .

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12 septembre 2016 1 12 /09 /septembre /2016 15:48
Repose-toi sur moi de Serge Joncour

Première incursion dans l'univers de Serge Joncour et je ne m'attendais pas du tout à cette ambiance .

Pourquoi avais-je imaginé un langage plus pompeux et une histoire beaucoup plus cérébrale et alambiquée ...

Un immeuble parisien, comme tant d'autres , avec une façade et des appartements "en première ligne" clinquants : attention , on est chez les Riches comme dirait un de mes amis , une cour avec un arbre qui masque en partie les appartements nettement moins luxueux derrière avec leurs habitants modestes .

Aurore, une jeune femme styliste occupe un bel appartement avec son mari Richard , un homme d'affaires américain et leurs deux enfants .

Ludovic, lui , a laissé la petite ferme familiale à sa soeur et est venu à Paris où il s'occupe de recouvrement de dettes , il est chargé des visites à domicile .

Deux mondes bien différents et qui ne font que se croiser devant les boites aux lettres mais Aurore est obsédée par le couple de corbeaux qui a expulsé celui de tourterelles qui avait élu domicile dans l'arbre de la cour , cela en devient cauchemardesque jusqu'à ce que Ludovic règle définitivement le problème à coup de carabine !

Deux êtres attachants car fragiles sous leurs armures de bourgeoise parisienne et de gros dur , ce sont ces failles qui les aimantent .

J'ai bien aimé l'approche pudique et réaliste de Serge Joncour même si parfois c'est un peu caricatural ... et je suis ravie d'avoir dépassé mes à priori sur cet écrivain , donc je vais poursuivre la découverte de ses romans .

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9 septembre 2016 5 09 /09 /septembre /2016 16:55
Romanesque de Tonino Benacquista

Amants maudits parce qu'ils s'aiment au dessus de toute autre contingence , l'histoire de la cueilleuse de baies et du braconnier traverse les siècles et les pays du monde entier .

Leur amour dérange et agace aussi bien sur terre qu'au ciel et ils sont ballotés de la chambre d'un Roi de France au Moyen Age à un théâtre d'une ville des Etats Unis à l'époque actuelle .

Un conte joliment raconté, même si j'ai trouvé plus de bonheur et de justesse d'écriture aux époques anciennes et une platitude un peu agaçante des temps récents .

Je ne connaissais pas cet auteur qui visiblement sort de ses sentiers habituels .

Ce roman sur un sujet éminemment rabattu donc "casse gueule " s'en sort plutôt bien et ravira tous ceux qui veulent mettre un peu , beaucoup, éperdument de Romanesque dans leur quotidien .

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9 septembre 2016 5 09 /09 /septembre /2016 16:16
Moka de Tatiana de Rosnay

A l'occasion de la sortie de l'adaptation cinématographique de ce roman, Moka publié initialement en 2009 refait une petite sortie .

Le monde bien rodé de Justine s'écroule lorsqu'elle reçoit un appel pour lui annoncer que son fils Malcom, 13 ans a été renversé par une voiture , que le jeune garçon est dans le coma et que le conducteur du véhicule s'est enfui .

Comment affronter ce drame ? le couple franco-anglais réagit chacun à sa manière et au lieu de rester soudés et de faire face ensemble , Justine et Andrew vivent ces jours d'angoisse et d'attente en s'éloignant l'un de l'autre avec une incompréhension grandissante .

Pour Justine, la recherche de la voiture, un vieux modèle de Mercedes couleur Moka et de son conducteur ne va pas assez vite et elle fait tout pour accélérer l'enquête quitte à sortir de la légalité et à agir impulsivement , cela devient une obsession que ne comprend pas son mari .

Les personnages sont touchants et attachants , y compris les personnages secondaires, avec une analyse psychologique qui apparait assez juste et fine .

Bien sûr difficile de ne pas sombrer dans le mélo mais pour de nombreux lecteurs parents (ou pas ) le sujet a une profonde résonance et si j'ai bien aimé ce livre, j'en ai déduit aussi que je n'irai pas voir son adaptation au cinéma, pour ne pas être obligée de ressortir de la salle avec trois paires de lunettes noires pour masquer mes yeux rougis et gonflés ...



















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3 septembre 2016 6 03 /09 /septembre /2016 17:06
Soyez imprudents les enfants de Véronique Ovaldé

Le destin d'Atanasia Bartolome va se dessiner le jour où accompagnant sa classe dans un musée de Bilbao alors qu'elle avait 13 ans, elle est subjuguée par une toile d'une femme nue du peintre Roberto Diaz Uribe.

C'est pour elle, le déclic de la sortie d'une enfance entre deux parents taciturnes, le départ vers le monde , l'inconnu et le passé de sa famille .

Car grâce aux bavardages de sa grand-mère Esperanza, elle découvre que ce peintre a été élevé par cette même grand-mère , qu'il est le cousin de son père et qu'il a mystérieusement disparu depuis de nombreuses années.

Atanasia part alors à Paris rencontrer un professeur spécialiste du peintre , un russe alcoolique volontiers agressif, c'est pour elle le début de l'exploration non seulement de la vie de l'artiste mais de la vie tout court avec un appétit de découverte et de nouveautés tout en racontant l'histoire foisonnante de la famille Bartolome, des hommes ambitieux mais poussant leur insatisfaction jusqu'à leur disparition subite: "soyez imprudents les enfants "recommandation lancée par une des génitrices et dont on peut faire la devise de cette famille si originale .

Remontant de temps anciens jusqu'à l'histoire la plus récente, celle de ses parents qui ont été d'une discrétion maladive , c'est une quête de soi , un roman initiatique tout autant que conte sans vraiment verser dans le fantastique, cela reste toujours à la limite du réalisme porté par une jeune femme qui ne veut pas sombrer dans la mélancolie maternelle .

on reconnait les thèmes de Véronique Ovaldé, son écriture fluide, souvent nerveuse , on passe de la troisième personne à la première au fil des phrases : on ne s'ennuie jamais et c'est ce que j'aime !

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30 août 2016 2 30 /08 /août /2016 14:13
Ecoutez nos défaites de Laurent Gaudé

Ceux qui connaissent bien les oeuvres de Laurent Gaudé reconnaitront sans peine le style lyrique de l'auteur qui ressemble par moments dans cet ouvrage à une geste antique .

Assem, agent des services secrets français est à la veille d'une nouvelle mission , il rencontre à Zurich au bar de son hôtel , Mariam, une archéologue irakienne qui passe sa vie à traquer les oeuvres de musée volées après avoir assisté au pillage du musée de Bagdad .

Chacun est arrivé au bout de quelque chose, Assem sent venir le temps de la réflexion après l'action , et Mariam doit affronter la maladie, chacun dépose une offrande à l'autre après cette nuit unique, Assem , ce sont quelques vers du poète ... et Mariam, la statue du dieu Bés.

Entre les quelques jours autour de cette rencontre, Laurent Gaudé insère trois épisodes de combat: celui du Général Grant lors de la bataille de Shiloh contre l'armée des confédérés et qui sera la plus sanglante de la Guerre de Sécession , l'histoire de Haïlé Sélassié à partir de sa défaite contre l'armée italienne de Mussolini et de son exil et celle, enfin, d'Hannibal Barca lors de sa tentative de conquête de Rome .

Chaque histoire, en soi , est marqué du sceau de la défaite .

Je n'ai pas réussi à entrer en phase avec ces histoires , celles du passé étant plutôt un survol pour arriver à la constatation du thème principal de la défaite et les réflexions et les états d'âme d'Assem et Mariam sont tristement d'actualité , celles de héros fatigués .

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