Conque de Perrine Tripier

Il existe un royaume où pour endormir les petits enfants, on leur chante la légende de lointains ancêtres, les Morgondes, un peuple actuellement disparu dont il ne subsiste que des fantasmes.

Or, lorsqu'une équipe d'archéologues , dans une ultime tentative , trouve enfin des traces d'une civilisation ancienne , l'Empereur, persuadé qu'il ne peut s'agir que de ces fameux Morgondes, engage une historienne renommée, Martabée , une femme de 45 ans pour faire connaitre au peuple cette trouvaille remarquable grâce aux bulletins publiés dans le journal et dans lesquels il y glisse sa patte ... Il espère ainsi redonner à la nation son sentiment d'unité et de fierté ...

Remarquable, effectivement, les premières fouilles mettent à jour des merveilles, dont les conques en or , instruments de musique , interprétés comme éléments d'une civilisation raffinée !

Un émerveillement général qui va être nettement refroidi par les découvertes suivantes.

Sous forme d'un conte moderne, Perrine Tripier pose la question de la manipulation des faits , de la puissance politique qui se permet d'arranger l'Histoire pour la façonner à sa gloire.

La figure de l'Empereur est emblématique de l'aveuglement auquel peut conduire le pouvoir , mais aussi du ridicule avec la perte du bon sens et du fossé qui se creuse entre un palais impérial étalant une richesse indécente face à un peuple témoin de dépenses somptuaires et qui , lui, est pressé de taxes.

Dans ce contexte, Martabée , femme ambitieuse, se complait des largesses de l'Empereur et son orgueil lui fait oublier ou reléguer au loin tout esprit critique.

L'analyse est pointue, étonnante , une fois de plus , de maturité et de sens de l'observation de nos ambiguïtés . Bien entendu , les travers des personnages sont aisément transposables à notre époque ...

Et même si les phrases redondantes , le lyrisme débridé et les descriptions alambiquées   m'ont parfois agacées , j'ai beaucoup aimé ce roman , m'imaginant errer dans un palais grandiose seule, face à la mer comme dans une toile surréaliste .